Migrant Stories

L'OIM lance un programme d'eregistrement des déplacés

Haïti a été sérieusement touché
par le séisme dévastateur du 12 janvier dont l'onde
de choc a provoqué des milliers de déplacés,
une situation jamais vécue auparavant dans l'histoire de ce
pays aux 8 millions d'habitants.

A côté des 300.000 morts du terrible tremblement de
terre, plus de 1.3 millions de personnes se sont retrouvées
sans domicile du jour au lendemain. Plus d'un millier de centres
d'hébergement se sont créés  dans tout le
pays.

Six mois après la catastrophe qui a frappé
Haïti, un nombre important de survivants se trouve encore dans
des camps ou abris provisoires. Dans le but de collecter des
informations sur ces populations, l'OIM en collaboration avec la
Protection Civile Haïtienne (DPC) a mis en œuvre depuis
le mois de février un programme d'enregistrement des
familles de déplacés. L'objectif de ce programme est
de trouver, à partir des informations collectées, des
solutions concrètes, à court et moyen terme pour ces
populations.

A Carrefour, dans la cour de l'établissement scolaire des
sœurs salésiennes et les Frères salésiens
du quartier de Thor, une longue ligne s'étire sur cinquante
mètres sous un soleil brûlant. Les sinistrés du
séisme du 12 janvier attendent, pour se faire enregistrer
par les équipes de l'OIM.

« J'habitais dans une petite maison, elle a
été détruite lors de l'événement
du 12 janvier.  Toutes mes affaires sont enfouies sous les
décombres. Mes deux enfants ont subi de graves blessures.
Trois jours après le séisme, j'ai retrouvé
l'un d'eux au milieu des cadavres dans les locaux de la Marine
haïtienne [Bizoton, Port-au-Prince, ndlr] avec une grave
lésion à la tête. L'autre  enfant s'est
blessé au niveau du pied et a perdu deux de ses orteils. Le
peu que j'avais pu sauver a été volé pendant
notre séjour à l'hôpital. Il ne me reste plus
rien », bredouille Résia Elois, répondant aux
questions des employés de l'OIM.

Cette femme de 54 ans espère vivement trouver un meilleur
endroit où poser ses affaires. « Tout ce que je veux
c'est un abri sûr », ajoute-t-elle. « Depuis plus
de deux mois, je suis sous une tente. Ce n'est pas l'idéal
mais je suis obligée de rester dans ce camp», affirme
Résia Elois, enregistrée avec ses deux
enfants.   

La situation des sans-abri est toujours préoccupante mais
avec l'aide de l'Organisation internationale pour les migrations,
des centaines de milliers de personnes ont été
enregistrées. A ce jour, l'OIM a enregistré dans plus
de 150 sites, environ 125 000   familles soit 540 000
personnes.

Le processus d'enregistrement mis en œuvre par l'OIM se
déroule en trois étapes. Dans un premier temps, un
coupon de couleur est distribué à tous les chefs de
famille vivant dans le camp ou abri provisoire. Ensuite, chaque
chef de famille se rend auprès des agents de l‘OIM
afin d'enregistrer l'ensemble des membres de sa famille vivant avec
lui/elle dans le camp.

Enfin, les informations collectées après chaque
enregistrement sont entrées au sein d'une base de
données dont le contenu est accessible à tous les
acteurs gouvernementaux ou humanitaires travaillant sur les
problématiques de déplacement.

« Pour ce travail, il y a différentes
étapes. On crée une matrice capable de suivre le
déplacement des gens. Les personnes doivent répondre
à des questions relatives à leur origine, leur
famille, le nombre de personnes par famille », explique Jean
Sébastien Jérôme, un des responsables du
programme d'enregistrement.

Pendant l'enregistrement, les équipes de l'OIM
s'assurent, au travers de différentes mesures (coordination
avec les comités locaux, équipes de
sécurité…) du bon déroulement de
l'enregistrement. Ensuite, les agents de l'OIM et ses partenaires
sont déployés dans le camp d'hébergement afin
de procéder méthodiquement à l'enregistrement
des résidents. Les enquêteurs visitent chaque tente
où un coupon est remis au chef de la famille.

Une fois enregistrées, les données recueillies
vont être transmises à un ensemble de partenaires de
l'organisation internationale pour la migration qui interviennent
dans les centres d'hébergement.  

Depuis la catastrophe, lors du processus d'enregistrement, les
sans-abri expriment dans bien des cas leur désir de se
rendre dans un camp planifié beaucoup plus près de
leur lieu d'origine. « En ce qui me concerne, je
préfère aller du côté de la Croix des
Bouquets parce que je suis de Belle-Anse », dit Resia
Elois.

Quant à Michelson Denis, père lui aussi de deux
enfants, résidant de Côte-Plage 16, un quartier de la
commune de Carrefour, il souhaite que ce processus avance à
grand pas si cela peut l'aider à sortir de sa situation.
« Tout ce qui m'intéresse maintenant, c'est d'aller
dans un endroit différent d'ici. C'est pour cela que je suis
venu m'enregistrer.»

«  Si on m'envoie dans la ville de
Léogâne, ce serait plus intéressant pour moi,
je n'envisage pas d'aller ailleurs. Je me sentirai
éloigné de ma famille et de mes parents. C'est ici
mon quartier, c'est ici que je mène toutes mes
activités »,  déclare Denis qui dit ne pas
être prêt pour un saut vers l'inconnu.

Jean Sébastien Jérôme raconte les
difficultés rencontrées lors du processus. «
Des fois, il y a des confusions sur le processus – les gens
espèrent qu'ils vont recevoir de la nourriture, par exemple.
Quand on leur demande s'ils veulent se déplacer, les gens ne
sont pas sûrs et font par de leur inquiétude en raison
de l'incertitude. » C'est précisément pour
cette raison que l'OIM réalise des programmes d'information
à travers ses mobilisateurs communautaires pour les informer
en amont sur le processus de relocalisation.

Ce processus d'enregistrement des personnes
déplacées, qui a démarré en
février continue de progresser. Aucune date n'a
été déterminée pour la fin de ce
programme. « Chaque semaine, on enregistre plusieurs milliers
de personnes  dans les camp d'hébergement provisoires
mais on ne sait pas quand cela se terminera. L'arrivée de la
saison cyclonique va rendre la tache beaucoup plus difficile»
confie Sébastien Jérôme.

Grâce au processus d'enregistrement, qui a permis de
recueillir  des informations pertinentes sur les personnes
vivant dans les camps, des milliers de personnes ont pu
déjà être relocalisées dans des sites
planifiés comme Tabarre Issa  (dans la commune de
Tabarre) et Corail-Cesselesse (situé à 20 km au nord
de la capitale haïtienne).

Le programme d'enregistrement mené par l'OIM,  en
plus de fournir des informations précises concernant les
familles de déplacés sur l'ensemble du territoire
haïtien, constitue pour les acteurs nationaux et
internationaux un élément indispensable dans
l'élaboration de stratégies visant à venir en
aide aux populations concernées.