Migrant Stories

Jacmel, la cité touristique se remet lentement de ses blessures

Jacmel, ville portuaire de 40.000 habitants située à
40 kilomètres au sud de la capitale Port-au-Prince, se remet
lentement mais sûrement de ses blessures post-séisme.
La catastrophe a décimé dans les rangs de la
cité touristique près de 450 personnes,
détruit 2 500 maisons et jeté des milliers de
Jacméliens à la rue, selon les chiffres de la mairie
de Jacmel.

Ceci sans compter les nombreuses blessures infligées au
patrimoine de la Métropole du Sud-est. Des murs de maisons
coloniales qui faisaient le charme de Jacmel, proclamée
capitale culturelle du pays, sont lézardés, des pans
d'histoire s'en trouvent fissurés.

Les Jacméliens ne se laissent pas abattre cependant. La
ville a des trésors qu'un séisme ne peut
altérer : ses plages, ses gens, son hospitalité, ses
artistes. La peinture jacmélienne est connue dans le monde
à travers notamment Préfète Duffaut et ses
« villes imaginaires ». Des personnalités comme
l'actuelle gouverneure générale du Canada,
Michaëlle Jean, sont originaires de la charmante bourgade du
Sud-est d'Haïti. Mme Jean est elle-même nièce de
l'écrivain franco-haïtien René
Depestre. 

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target="" title="">Migrations Eté 2010

Trois choses font de Jacmel une région
appréciée d'Haïti : ses artistes, son cachet
particulier et son carnaval. Cet événement à
lui seul attire chaque année plus de 30 000 personnes,
venant d'Haïti et de l'étranger, nous apprend Dithny
Joan Raton, coordinatrice du plan directeur Tourisme Sud-est.

« Les autres événements à attirer la
grande foule à Jacmel sont les fêtes champêtres
et la fête des saints-patrons St-Jacques et St-Philippe
», assure Mme Raton.  

La fête patronale de Jacmel le 1er mai
écoulé a été justement l'occasion pour
les Jacméliens de montrer la vivacité de leur ville.
Des milliers de personnes d'horizons multiples étaient
venues fêter dans la cité touristique.

« Nous avons une si belle mer, nous ne pouvons pas la
laisser se gaspiller ». Cette phrase de Daniel Fouchard,
directeur général au ministère du Tourisme
présent à la patronale, résume l'optimisme des
Jacméliens qui ont fêté pendant un week-end
leur saints patrons, pour « reprendre goût à la
vie ».  

Mais après il faut gérer le quotidien, vivre avec
la nouvelle réalité imposée depuis 6 mois par
le cataclysme. La ville, fameuse pour son carnaval bigarré,
qui a d'ailleurs été renvoyé suite au
séisme, est marquée à jamais. Elle tente de
cicatriser, panser ses blessures. Cinq camps de fortune s'ajoutent
désormais au paysage, y compris les 4x4 frappés des
logos des différentes ONGs, comme l'Organisation
internationale pour les   migrations (OIM) qui se
dévouent à apporter un soulagement à la
population victime.

Le plus grand des camps spontanés d'hébergement
est celui, situé au bas de la ville, de  Pinchinat. 975
familles (4 252 personnes selon la mise à jour du 23 avril
2010) vivent depuis le 12 janvier sur ce vaste terrain de football,
nous apprend Ben Oduwa, responsable du programme coordination et de
gestion des camps de l'OIM à Jacmel lors d'une visite
à Pinchinat un dimanche après-midi. 

Ces personnes doivent être relocalisées  et
l'OIM, poursuit M. Oduwa, cherche actuellement des espaces plus
sûrs pour les accueillir.

Les conditions de vie dans ces espaces  exigus ne sont pas
l'idéal et la promiscuité y est très
prononcée. A Pinchinat, les sans-abris logent sous les
tentes vert kaki, courtoisie de  l'Armée
vénézuélienne. La chaleur du soleil y est
étouffante mais c'est mieux que des draps
étirés par les quatre piquets des débuts. La
pluie aussi pose problème, car le sol en terre battue
devient une véritable mare à chaque averse. 

Charlotte Charles, membre du comité de gestion du camp,
réclame de meilleures conditions de vie pour ses compagnons
d'infortune. « J'ai entendu dire qu'on va nous reloger, mais
avant on aimerait avoir la garantie de meilleurs traitements
qu'ici. Lorsqu'il pleut, les gens sont obligés de rester
debout sous leurs tentes ».

Charlotte, artiste dans l'âme, montre ses dernières
œuvres aux visiteurs de passage au camp. « J'avais un
appartement et un studio d'art à Jacmel. Le premier s'est
effondré et le second fissuré »,
indique-t-elle.

«  Depuis le 14 janvier je suis ici, un
étranger m'a donné une tente Shelter Box, mais je
peux vous dire que les choses sont dures ici, ce n'est pas normal
de vivre ainsi. Je n'ai pas l'habitude de rester sans rien faire,
ma vie d'avant c'était de peindre, de travailler, de former
des jeunes, mais tout a changé», confie la jeune femme
dans la trentaine portant des dreadlocks, les yeux embués de
larmes.

L'aide de l'OIM nous est très précieuse, ajoute
cependant ce membre de l'un des Comités du Camp Pinchinat.
« Elle nous a permis de nous organiser, d'apprendre beaucoup
de choses en terme d'organisation et de gestion du camp
».

« C'est un travail de coordination du site. L'OIM s'est
entretenue avec les chefs de camps et leur a montré comment
s'organiser. Cela nous a rendu plus efficaces pour aller vers les
organisations humanitaires et d'avancer », ajoute Andral
Maxito, un mécanicien au chômage forcé à
Pinchinat. 

L'OIM, présente dans les années 1995-98, est
revenue à Jacmel en février dernier suite au
séisme du 12 janvier. Durant cette absence, le bureau
régional de Petit-Goâve, situé à
quelques  dizaines de kilomètres au nord de Jacmel, a
continué à assurer une présence de l'OIM dans
la région, selon Raynald Blouin, chef du bureau de l'OIM
à Jacmel. 

« A travers son programme de coordination et de gestion
des camps (CCCM), l'OIM coordonne les activités et
l'assistance humanitaire entre les camps. Elle organise notamment
des formations en gestion et coordination de camps », nous
explique Ben Oduwa », le coordinateur du programme à
Jacmel.

Il s'agissait dans un premier temps de gérer l'urgence en
fournissant notamment des tentes, des bâches et d'autres
matériels. Mais cette phase passée, l'OIM essaie
présentement de démarrer un programme de construction
de mille abris transitoires ( transitional shelters) dans le
Sud-est pour ceux qui ont perdu leurs  maisons. 

« Maintenant, en prévision à la saison
cyclonique, il est question de faire sortir les gens des camps
spontanés en favorisant leur retour sur leur lieu
d'habitation d'avant le séisme. En dernier recours, le CCCM
facilite l'aménagement de structures planifiées, dans
le respect de tous les standards internationaux. Des contacts ont
été établis avec les autorités locales
pour trouver des espaces appropriés », indique Ben
Oduwa.

« Une première étape consistera à
installer de nouvelles tentes sur le nouveau site qui seront par la
suite remplacées par des abris transitionnels en dur»,
poursuit-il.

Le programme CCCM de l'OIM à Jacmel est financé
par Emergency Response Relief Fund for Haiti (ERRF). L'organisation
a également reçu des fonds de l'AECID (Agence
espagnole de coopération Internationale pour le
développement) pour un projet à haute
intensité de main-d'œuvre (cash for work) axé
sur le ramassage de débris dans certaines écoles
publiques et des résidences privées de personnes
déplacées. Le projet de construction de plus de mille
abris transitoires pour le département du Sud-Est est
financé principalement par le Gouvernement Japonais, ainsi
que des fonds ERRF des Nations Unies.

Coup dur pour le tourisme

Le tourisme est l'une des principales activités de
Jacmel, mais la catastrophe a changé les donnes, et les
chiffres. Déjà, sur les 712 chambres d'hôtel et
d'hôte dont disposait la ville, il n'en reste plus que 500,
selon Dithny Joan Raton, citée plus haut, qui est
également chargée de mission pour le ministère
du Tourisme.  

Sur 130 ateliers d'artisanat de la ville, 11 d'entre eux ont
été endommagés, les 158 groupes masqués
de la ville ont enregistrés des pertes de plusieurs dizaines
de milliers de dollars, énumère Mme Raton
complétant un sombre tableau.

Cependant, Dithny Joan Raton annonce des projets de
rénovation comme celle de la rue du Commerce fortement
frappée par le séisme. Il est aussi question de la
construction d'un nouveau pavillon d'accueil à
l'aérogare de Jacmel pour mieux accueillir les visiteurs de
cette ville historique qui attend encore des touristes en
dépit de tout.

« Il y a beaucoup de réparations dans les
hôtels. Ceux qui sont conformes aux règles peuvent
recevoir du monde», souligne pour sa part Michaëlle
Craan, figure bien connu du tourisme jacmélien.

La diminution des chambres et le ralentissement du trafic
aérien portent un mauvais coup au tourisme, « mais la
reprise se fait petit à petit », soutient Dithny Joan
Raton aux dont les cheveux d'or donne une idée de la
luxuriance de Jacmel. 

L'architecture de la ville a pris aussi un coup. Des anciennes
maisons se sont effondrées ou fissurées entrainant
avec elles la perte d'œuvres d'art. Mais des organisations
internationales comme l'UNESCO veulent aider à la
restauration de ces patrimoines.