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Symposium international du Haut Conseil des Béninois de l’Extérieur : « Les Béninois de l’extérieur, la diaspora et les enjeux du développement humain durable »

Messieurs les Ministres,

Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs,

Chers participants,

C'est un honneur d'être aujourd'hui parmi vous aujourd'hui
à Cotonou pour ce 1er Symposium International du Haut
Conseil des Béninois de l'Extérieur. Je tiens
à féliciter le Gouvernement du Bénin pour ses
efforts dans le but d'impliquer la diaspora au développement
de leur pays d'origine.

Je souhaite vous exprimer tout le plaisir qui est le mien de
pouvoir intervenir sur un thème qui me tient tout
particulièrement à cœur et qui est l'un des axes
de travail majeurs de l'Organisation internationale pour les
migrations, à savoir les migrations et le
développement et plus particulièrement la
contribution des diasporas africaines à leurs pays
d'origine.

Le visage des migrations a beaucoup changé ces
dernières décennies. Aujourd'hui dans un monde
globalisé, les migrants ont la possibilité de devenir
acteurs du développement économique à la fois
dans leurs pays d'origine et d'accueil. Comme la majorité
des pays africains, le Bénin dispose d'une forte
communauté résident à l'extérieur avec
3 millions d'expatriés. Si 98,3% de la diaspora se trouve en
Afrique, elle est également présente en Europe (avec
30'000 expatriés) et aux Etats-Unis (avec 8'000
expatriés). Les Béninois ont la possibilité de
se mobiliser afin d'atténuer les effets négatifs des
migrations - à savoir la pénurie de professionnels
qualifiés et notamment les professionnels de la santé
- et tirer le meilleur parti des aspects positifs.

Ces contributions aux pays d'origine revêtent de
nombreuses formes : elles se font sous forme de capital financier,
de capital humain et social.

C'est par le transfert de qualifications acquises par
l'éducation, la formation et l'expérience
professionnelle que les diasporas peuvent contribuer au
renforcement des capacités de leurs pays dans
différents domaines tels que l'éducation,
l'industrie, le commerce ou encore la santé. Depuis 2001,
l'Organisation internationale pour les migrations a entrepris la
mise en œuvre de son programme « Migrations pour le
développement en Afrique (MIDA) » qui a pour vocation
de développer les synergies potentielles entre les profils
des migrants africains et les besoins des pays, en facilitant le
transfert des compétences et des ressources vitales de la
diaspora africaine dans les pays d'origine. Il s'appuie sur la
notion de mobilité des personnes et des ressources et, de
cette façon, offre des options de réinvestissement du
capital humain sous la forme de retours temporaires ou virtuels
grâce à l'enseignement à distance.

Le Bénin a montré à plusieurs reprises son
intérêt pour la promotion du développement
socio-économique du pays par la mobilisation de la diaspora
béninoise se trouvant à l'extérieur de son
territoire. C'est ainsi qu'il a demandé à l'OIM son
soutien technique et financier pour la mise en place d'un projet
pilote de mobilisation de la diaspora béninoise et
l'identification des besoins prioritaires du Bénin.

Le projet MIDA Bénin :

  • Recense les besoins en compétences et autres ressources
    par secteur prioritaire. Les Béninois de l'Extérieur
    souhaitant apporter leurs compétences au
    développement de leur pays et participer au programme
    peuvent s'inscrire sur la base de données du site internet
    ;
  • Promeut l'appel aux béninois de l'extérieur pour
    les besoins en expertises et en investissements au
    Bénin;
  • Organise le transfert des compétences et d'autres
    ressources de la diaspora
  • Assiste, en cas de déplacement, les béninois de
    la diaspora pendant leur séjour au Bénin.

Le recours au « e-learning » est une nouvelle option
pour le transfert de compétences et qui pourrait être
adaptée au Bénin. Lancée en 2003, cette
initiative pilote d'apprentissage à distance a permis
à 700 étudiants en deuxième année de
maîtrise de l'Université de Lubumbashi en RDC de
suivre des cours de formation en collaboration avec
l'Université libre de Bruxelles. En facilitant le transfert
de compétences, elle permet ainsi d'atteindre virtuellement
un large auditoire et de réduire les coûts liés
aux frais de déplacements physiques.

L'idée du projet MIDA Bénin est bien entendu
d'inscrire ce projet dans la continuité car une fois que les
liens et la collaboration entre le Bénin et sa diaspora
seront bien établis, le Gouvernement du Bénin pourra
s'approprier le projet et l'utiliser comme levier de
développement.

Un autre volet du programme MIDA de l'OIM est l'organisation de
dialogues entre les membres des diasporas africaines et les membres
des gouvernements des pays d'origine. Le 24 mai dernier, les
membres de la Communauté Béninoise de Suisse ont pris
part à un dialogue avec le ministre de la Santé du
Bénin pour discuter de l'amélioration du
système de santé au Bénin. Suite à ce
dialogue et en se basant sur leurs compétences, les membres
de la diaspora béninoise se sont engagés à
présenter un projet au ministre de la santé visant
à apporter leur aide dans l'amélioration de la
gestion de qualité des soins au sein des hôpitaux
béninois.

Il y a également un désir croissant des diasporas
africaines d'investir et de faire des affaires dans leurs pays
d'origine en apportant leurs contributions financières. A ce
propos, je souhaiterais aborder le cas des transferts de fonds
effectués par les migrants et qui jouent un rôle
primordial dans le développement des pays d'origine. En
effet, en leur qualité d'agents potentiels de
développement, les migrants peuvent contribuer à
combattre la pauvreté par le biais d'investissements, de
création d'entreprises et même de leur
consommation.

Comparativement aux autres régions du monde en voie de
développement, l'Afrique sub-saharienne ne reçoit
qu'un faible montant des transferts effectués dans le monde
(1,5% du montant total des transferts dans le monde). En 2005, les
transferts de fonds vers l'Afrique sub-saharienne ont
représenté plus de 8 milliards de dollars. A titre
d'exemple, le Bénin a reçu 84 millions de dollars
soit 2,1% de son PIB. Le Sénégal a quant à lui
reçu 551 millions de dollars en transferts de fonds cette
année là soit 6,7% de son PIB (World Bank 2006).

Pourtant de nombreux obstacles subsistent encore et des efforts
doivent être entrepris pour une meilleure utilisation est
gestion de ces transferts :

  • Les Gouvernements doivent mettre en place des moyens efficaces
    et plus sécurisés tels que la régularisation
    du secteur informel, la réduction des coûts des
    transferts.
  • Des politiques incitatives doivent être prises par les
    Gouvernements pour favoriser l'investissement des transferts de
    fonds des diasporas en facilitant l'épargne et un
    accès plus large aux crédits bancaires dans les pays
    d'origine.
  • Enfin, les Gouvernements ont besoin d'améliorer les
    mécanismes de collecte de données de ces
    transferts.



Dans le but de palier à ses obstacles, la Conférence
ministérielle des Pays les Moins Avancés qui s'est
tenue au Bénin en 2006 a annoncé la création
d'un Observatoire des Transferts de fonds des Migrants pour les PMA
au Bénin. Cet Observatoire aura pour but de :


  • Collecter et de disséminer de meilleures informations et
    données sur les flux des transferts, l'usage qui en est
    fait, les mécanismes de transferts et les bonnes pratiques
    ;
  • S'appuyer sur l'expérience, les ressources statistiques
    et les réseaux disponibles au sein des organisations
    internationales pour recueillir les informations et entreprendre
    les travaux de recherche utiles aux praticiens et décideurs
    des PMA ;
  • Assister les PMA dans l'identification, la conception et le
    développement de politiques et activités relatifs aux
    transferts de fonds ;



L'OIM travaille en étroite collaboration avec les
Gouvernements, les migrants, les associations de migrants, les
institutions financières, les ONG, les agences de
développement ainsi que les donateurs dans le but de
faciliter le développement de politiques et de
mécanismes qui pourraient améliorer les services
à disposition des migrants et renforcer l'impact des
transferts sur le développement. A titre d'exemple, l'OIM a
lancé le programme MIDA Italie qui s'adresse aux membres des
diasporas sénégalaise et ghanéenne souhaitant
contribuer au développement de leurs pays d'origine.
Grâce à la collaboration de d'institutions
financières en Italie, le projet tend à promouvoir la
réduction des transferts de fonds, la création de
nouveaux produits financiers et réseaux d'épargne
dans le but d'encourager les investissements productifs et les
programmes de développement. A cet égard, un accord
entre la Banque de l'Habitat du Sénégal et une banque
italienne a été mis en place pour réduire les
coûts des rapatriements de fonds des migrants
sénégalais.

Prenons justement l'exemple du Sénégal. En 2005,
les Sénégalais de l'Extérieur ont
transféré près de 551 millions de dollars vers
leurs pays d'origine.

Au Sénégal, les transferts de fonds des
émigrés sont devenus un enjeu socio-économique
déterminant dans l'économie nationale compte tenu de
l'importance des flux générés par ces
transferts.

Le marché des transferts de fonds au
Sénégal a connu une évolution rapide au cours
de ces dix dernières années. De nombreuses formes de
coopération ont été établies entre les
institutions financières et les canaux de transferts de
fonds tels que Western Union, Moneygram. La Poste suit
également cette tendance et grâce à un
réseau dense de bureaux, elle demeure un partenaire
sûr pour les Sénégalais de l'Extérieur
souhaitant transférer de l'argent vers leur pays d'origine.
Le Gouvernement sénégalais a fait des efforts dans ce
sens en créant notamment le Fonds de promotion
économique (FPE) qui offre à la fois un fonds de
refinancement et un fonds de garantie pour les
établissements financiers finançant les PME. Le
Programme d'Appui au secteur privé, qui regroupe plusieurs
bailleurs de fonds, a introduit des réformes dans le but de
faciliter l'accès au crédit des PME et de leur offrir
une gamme de produits diversifiés répondant à
leurs besoins spécifiques. Un des modèles de
diversification proposés est l'utilisation de
l'épargne des immigrés sénégalais.

Je souhaiterais souligner à nouveau que les rapatriements
de fonds sont l'un des bénéfices les plus tangibles
que les pays d'origine peuvent retirer des migrations. Une
meilleure utilisation et répartition des transferts de fonds
permettront d'agir positivement sur la pauvreté et la
croissance économique en développant l'épargne
et les investissements dans des domaines tels que
l'éducation, la santé ou les activités
entrepreneuriales créatrices de richesses et d'emploi.

Ainsi, l'OIM encourage le Bénin à continuer ses
efforts dans la mise en place de l'Observatoire des Transferts de
Fonds des Migrants pour les PMA et se tient prête à
offrir toute assistance au Gouvernement béninois dans cette
initiative s'il le juge nécessaire.

Enfin, l'OIM encourage également le Bénin à
maintenir ses efforts pour la mise en œuvre de politiques de
renforcement des capacités en matière de gestion des
migrations. Cela passe notamment par une meilleure collaboration
entre les différents ministères afin de mieux
gérer la migration à savoir le Ministère des
Affaires Etrangères, le Ministère de
l'intérieur et surtout le Ministère des
Béninois de l'extérieur qui a un rôle majeur
à jouer. En effet, mettre en place un partenariat entre le
gouvernement béninois, les organisations
intergouvernementales, les entreprises du secteur privé, les
migrants et les associations de migrants basés à
l'Extérieur doit être encouragé et promu pour
maximiser les impacts positifs que peuvent engendrer les
migrations.

Enfin, le Bénin doit poursuivre ses efforts une meilleure
intégration du fait migratoire dans ses politiques et plans
de développement tels que les Documents de stratégie
pour la réduction de la pauvreté (DRSP).

Je vous remercie pour votre attention.