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51ème Session de la Commission de la Condition de la Femme

Madame la Présidente, Mesdames, Messieurs,

Nous sommes réunis cette année pour examiner les
discriminations qui subsistent encore aujourd'hui à
l'égard de la petite fille. Nous avons entendu tout au long
de ces derniers jours que la fille est souvent victime de
discrimination dès l'enfance et jusqu'à l'âge
adulte en raison des systèmes patriarcaux encore
répandus dans beaucoup de régions du monde. Son
statut social fait que ses besoins et ses droits fondamentaux sont
souvent bafoués et qu'elle est victime d'attitudes et de
pratiques nuisibles telles que la préférence
donnée aux fils, le mariage précoce, les mutilations
féminines génitales, la violence domestique,
l'inceste, les abus et l'exploitation sexuelle.

Je souhaite aujourd'hui concentrer mon propos sur l'impact de la
migration sur la situation des filles tant du point de vue des
conséquences positives de la migration sur leur
éducation et leur bien être que sur les risques de la
migration spécifiques aux fillettes et aux jeunes
filles.

La migration, lorsqu'elle est réussie, peut être
à l'origine d'effets très positifs sur
l'éducation des filles. Désormais, la femme se
déplace de manière indépendante, et devient
dans beaucoup de cas le soutien de la famille par les transferts de
fonds qu'elle envoie dans son foyer. Ce rôle de soutien lui
donne le pouvoir de décider de la manière dont sera
dépensé le revenu du foyer et on s'aperçoit
que lorsque la femme participe à la gestion des finances,
elle privilégie le bien être et l'éducation des
enfants, à plus forte raison des filles. Cela se traduit par
une scolarité plus longue pour les filles et une meilleure
santé en général.

Pour autant, l'aspect économique de la migration n'est
pas le seul élément de promotion et d'autonomisation
des filles, les femmes migrantes représentent souvent des
rôles modèles féminins positifs pour les jeunes
filles qui permettent de faire évoluer les rôles
traditionnels dévolus à l'homme et à la femme
tant dans la société d'accueil que dans la
société d'origine.

L'expertise des femmes migrantes peut également
s'avérer d'une grande utilité pour sensibiliser les
jeunes filles dans les pays d'origine aux dangers de la traite et
à la nécessité de privilégier la
migration légale. Il nous faut à la fois
reconnaître et encourager ce rôle en impliquant
davantage les femmes migrantes dans les campagnes d'information des
filles sur la migration et dans les politiques de lutte contre la
traite.

En effet la traite est un des risques principaux qui menacent
les filles et les jeunes femmes dans leurs mouvements migratoires.
C'est un phénomène transfrontalier qui affecte
presque toutes les populations du globe. Au cours de l'année
2006, l'OIM a assisté 1879 victimes de traite dans le monde,
parmi ces victimes 82% étaient de sexe féminin et
plus d'une victime sur 10 à moins de 17 ans.

Ce phénomène prend ses racines dans la
pauvreté, le manque d'activités
génératrices de revenus, dans la
vulnérabilité sociale que connaissent les filles et
les femmes dans beaucoup de régions du monde et dans
l'existence d'une demande pour une main d'œuvre à bas
coût et des services sexuels.

En Afrique beaucoup de jeunes filles sans opportunité
d'éducation supérieure sont recrutées pour
travailler en tant qu'aides ménagères au Moyen
Orient, certaines vont jusqu'à payer 1000 dollars aux
trafiquants pour obtenir un billet d'avion, un visa et une promesse
d'embauche. Dans de trop nombreux cas, la migration illégale
des jeunes filles par les trafiquants aboutit une fois dans le pays
de destination à des situations d'esclavage moderne, leur
passeport étant confisqué, les jeunes filles sont
forcées de se prostituer afin de rembourser la dette due aux
trafiquants.

D'autres, plus jeunes encore sont approchées par des
touristes prétendant leur offrir des opportunités
d'éducation en Europe parfois contre une somme d'argent
versée aux familles ; elles sont ensuite exploitées
dans des vidéos à caractère
pornographique.

Dans d'autres cas, ce sont des hommes ayant le statut de
réfugiés qui face à la difficulté de
trouver un emploi dans le pays d'accueil font venir une sœur,
une nièce ou même leur épouse et la forcent
à se prostituer.

Quels sont les dénominateurs communs des tous ces
exemples ? La grande vulnérabilité sociale des
victimes, leur genre, l'impunité qui règne encore sur
la violence contre les femmes et les filles.

Comment protéger plus efficacement les filles contre les
trafiquants ? Quelles sont les meilleures pratiques à
étendre dans le domaine de la lutte contre la traite?

La stratégie de l'OIM concernant la traite des personnes
comporte trois éléments, la prévention, la
protection et l'assistance aux victimes ainsi que le renforcement
des capacités des structures nationales. La
prévention consiste à informer les populations les
plus vulnérables pour empêcher qu'elles tombent aux
mains de trafiquants, à leurs fournir des informations
fiables sur les moyens d'émigrer de manière
légale.

Ces stratégies donnent de bons résultats mais
l'éradication de cet esclavage moderne nécessite une
action conjointe des Etats, des partenaires internationaux et de la
société civile. Considérant que la traite des
êtres humains génère chaque année
près de 19 milliards de dollars au profit du crime
organisé il faut partager l'information, poursuivre les
trafiquants, protéger les victimes et sensibiliser le public
aux horreurs de la traite et surtout donner aux victimes
potentielles les moyens de se battre et de se défendre
contre les trafiquants et l'éducation est une arme de ce
point de vue. J'appelle donc les gouvernements présents ici
aujourd'hui à renforcer autant que possible les programmes
d'éducation à l'égard des filles afin de les
rendre plus aptes à éviter les pièges de la
traite et à faire les choix qui leur permettront de
participer activement au développement économique et
social de leur pays.

Madame la Présidente, Mesdames, Messieurs, je vous
remercie.